28 février 2013

Sale temps pour la réaction


En répondant à une fillette l'autre semaine au Salon de l'agriculture "Sarkozy, tu ne le reverras plus", Hollande a été extraordinairement cruel. Il a décapité l'UMP qui était justement en train de faire passer son vénéré fantôme de chef pour le leader naturel incontournable du parti.

Les réactions furent à la mesure de l'outrage.



Jusque là, l'idée du Grand Retour n'était pas évoquée, elle était assez piteusement écartée à coup de déclaration édifiante - "Nous (les amis de S.) ne voulons que rendre hommage à l'oeuvre extraordinaire et incontestée de ce grand homme d'état que le monde nous envia".
Il semble finalement que ce soit bien à son retour que travaille ces UMP orphelins, l'aveu et la déclaration programmée de l’impétrant ne devant intervenir qu'au moment idoine.

Faire disparaître le chef, même avec des mots et même avec humour, c'est couper la tête de la pyramide réactionnaire : le chef au dessus, incontesté et incontestable, les gueux en bas (les sans-Rolex ou les minables à 5000€ mensuel), méprisés et méprisables.
Or ceux qui s'expriment aujourd'hui doivent leur position élevée dans la hiérarchie à leur héros et seulement à lui. Si on fait disparaître le héros, on les fait disparaître aussi.

D'où leur ire, les pauvres.


Là-dessus les résultats des élections italiennes tombent, et font rentrer à la chambre des Députés des représentants de Cinque Stelle, mouvement politique ambiguë mais clairement en opposition aux politiques d'austérité prônées par l’Europe et singulièrement par les partis néo-libéraux du type UMP (une très bonne analyse ici).
Réaction immédiate des défenseurs de l’orthodoxie : "Ils doivent revoter." "Ils ne sont pas crédibles. Ce n'est pas sérieux." "On a manqué de pédagogie" - celle-là est toujours goûteuse: elle affirme que le peuple du bas ne sait pas, n'a pas les moyens de comprendre, que la politique comme l'économie (pour le libéral, l'économie est la politique) est une affaire d'expert, de professionnel.
Le qualificatif méprisant trouvé pour les désigner leur est suggéré par le métier du leader, acteur: les "comiques".

Sur ce sujet se distingue Chatel, ancien ministre, un de ceux qui côtoya les sommets près du chef: "En France, on a un comique qui a fait 51%".
Expression triplement imbécile:
- présenter le résultat des élections présidentielles comme une imposture (rien de nouveau, trait largement distinctif d'une droite réactionnaire et revancharde)
- insulter allègrement 51% des électeurs, sans doute des gueux rétifs à toute pédagogie
- évacuer d'un mot toute la problématique du résultat italien, du mouvement 5 étoiles en particulier et de tous les mouvements contestataires du même type, Indignés, Occupy Wall Street, etc...

Lui, la colère l'aura révélé, le pauvre. On pourrait imaginer qu'à d'autres époques ou en d'autres lieux, cette saillie l'aurait disqualifié politiquement pour longtemps.
Mais ici et maintenant, cette pensée a visiblement des adeptes.


Et puis voilà que l'inspirateur des Indignés justement, résistant de toujours, Stéphane Hessel, disparaît.
Malédiction, encore un comique à la une!
Un "droit-de-l'hommiste", en plus, qui prit position contre l'état d’Israël ce qui n'arrange pas son cas.

Non, décidément la droite réactionnaire a toutes les raisons d'être crispée ces temps-ci...

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